J'ai testé pour vous : citer Ciceron.

Y a t il un âge limite pour planter la petite graine, de l'amitié? Avons nous encore, une fois adultes, une parcelle de coeur en jachère sur laquelle déposer "cette personne tout juste rencontrée". Devons nous attendre qu'une relation se dessèche et meurt pour "avoir la place", ou arracher quelques plantations devenues infertiles voir toxiques pour les remplacer par de plus prometteuses? La récolte du bonheur des moments partagés est-elle au prix d'un désherbage en règle? Est ce qu'en amitié aussi, il faut faire des choix? Renoncer?

Qui réussit à être le jardinier de sa propre pépinière? Ciceron disait : "Si vous possédez une bibliothèque et un jardin vous avez tout ce qu'il vous faut". Alors moi je veux bien mais est ce que l'amitié ça s'apprend dans les livres et en regardant ses fleurs pousser? Avoir la main verte en amitié... il y a une application pour ça?

Qu' attend on de ses amis et qu' attendent ils de nous? Que sommes nous prêts à leur donner? A recevoir? Jusqu'ou? Pourquoi? Pourquoi pas?

J'ai le sentiment que l'amitié n'est pas si éloigné de l'amour. On tombe amis comme on tombe amoureux. Un jour, une personne, une rencontre, le hasard, la vie, aucun sens et pourtant un ressenti. Alors on se rassure en se disant qu'on " a des points communs", qu'on "partage des valeurs" ou encore "qu'on rigole bien ensemble". Mais au final, on est tombé amis. Un petit jardinier a distillé une poudre de perlinpinpin sur ces premiers échanges et les racines ont poussé. Sans qu'on s'en rende compte. Sans qu'on le veuille forcément. "ça s'est fait tout seul", "on s'est tout de suite entendus" "c'est fou ça".

J'aurais tendance à dire la première impression est toujours la meilleure. L"amitié prend sa place. Toute seule. Forte de ses racines subjectives. Avoir la main verte, en amitié, ce n'est rien d'autre que de la réciprocité, entre arroseur et arrosé.

Julie.

Comments

[Faron]

C'est vrai que Cicéron était fasciné par la philosophie, philosophie grecque s'entend. Il n'était pas le seul d'ailleurs, et tout ce que Rome comptait d'élites avait pour principal souci de se constituer une bibliothèque garnie par les auteurs grecs.

Or, d'origine modeste, Cicéron avait dû "galérer" avant d'accéder à la richesse et, par conséquent, de pouvoir s'offrir une bibliothèque digne de ce nom. D'autant plus que les livres (des copies bien évidemment) coûtaient- fort cher.

Lorsque, enfin, il put s'en offrir une, d'ailleurs encore plus richement dotée que celle de Lucullus réputé pour posséder pratiquement tout ce qui avait été écrit, il la faisait visiter à ses convives ou à ses clients (n'oublions pas qu'il avant tout avocat de profession).

Quand il prépare son réquisitoire contre Vérès, le gouverneur corrompu de Sicile, Cicéron ne cesse de faire référence à "sa" bibliothèque, au point d'y installer à demeure son secrétaire. Et d'y discuter le bout de gras avec sa femme, alors qu'il aurait pu le faire dans le salon.

De même, vu l'urbanisation outrancière de leur ville dans les années 50 avant J.C.,les Romains qui possédaient un jardin se comptaient sur les doigts de la main et faisaient, par là, des jaloux.

Il n'en reste pas moins que la réflexion de Cicéron rapportée dans ce blog peut effectivement avoir une portée philosophique en posant la bonne question : peut-on vivre sans amour, peut-on exister sans amis ? Vaste sujet.

De quoi méditer en ce long week-end de la Toussaint et de la Fête des Trépassés...

PS : Je regrette le bon vieux temps des versions latines et plus particulièrement les heures consacrées à Cicéron : quelle pureté de style, quel écrivain !

Ce que je regrette moins, c'est une punition que m'avait infligée un maître très imaginatif, qui m'avait fait traduire une page de Tacite en...allemand !